Crucifié avec le Christ, désormais je vis en Lui !

18 avril 2014

Mot de l’Evêque - Eglise d’Avignon n°99

L’atmosphère devient pesante, tout le monde murmure à son sujet, la haine grandit dans les cœurs : « Il doit mourir ! » Mais pourquoi ? Pourtant, cette conclusion s’impose aux autorités et elles sont prêtes à soudoyer Judas pour obtenir sa peau. Jésus en a conscience, il le sait, il est venu pour cela, pour donner sa vie pour la multitude : « Élevé de terre, il attirera tous les hommes à Lui ».

En réalité, il se charge de nos maladies, il prend sur lui nos infirmités ; il n’a plus visage humain et pourtant il reflète la souffrance de tous les innocents de la terre. Il a été arrêté, flagellé, couronné d’épines et le gouverneur peut nous le présenter en s’exclamant : « Voici l’homme ! » Nous n’avons plus visage humain. Jésus, je reste là à te contempler et plus je te regarde plus je découvre ma propre humanité défigurée par mon péché, par le mal qui me ronge de l’intérieur. En gardant les yeux fixés sur toi, j’aperçois la foule immense de tous les blessés de la terre, de tous les sans voix de notre monde, tu les prends dans tes plaies ouvertes, ils ne font plus qu’un avec toi. Tu m’invites à prendre place avec eux en toi, malgré la lèpre qui me ronge les chairs.

Alors j’entends Pilate qui s’écrie : « Voici votre Roi ! » Tu es un roi de dérision, couronné d’épines, la blessure des épines laisse couler le sang sur ton visage lourd de toutes les souffrances du monde, en guise de sceptre, tu as un roseau, tu portes certes un manteau pourpre, mais tout le monde se moque de toi, te bafoue, crache sur toi. Sous ton manteau royal, tous les condamnés de la terre sont là blottis, demandant grâce. Oui, tu es vraiment notre Roi ! Tu accueilles tous les hommes, comme eux, tu n’es plus qu’une loque humaine qui se laisse conduire à l’abattoir. Nous sommes tous là en Toi. Mystérieusement, ton amour nous envahit, il nous est donné, il m’est donné de sentir le poids de la croix qui pèse sur ton épaule ; l’alchimie de l’amour accomplit son œuvre en moi, en nous.

Ton chemin de croix se termine, les soldats dressent la Croix. Tu es crucifié, nous sommes crucifiés avec Toi, je suis crucifié avec Toi. Tu t’es chargé de nos maladies, tu as pris sur Toi toutes nos maladies, le péché de toute l’humanité, mon péché pèse sur toi, mais comme l’agneau muet qui n’ouvre pas la bouche, Tu te laisses conduire à la mort. Le bon larron te regarde et dans ton regard il comprend tout : aujourd’hui même, il sera avec toi en paradis. Mais la mort fait son œuvre, la soif te ronge les entrailles, la soif de cet échange bouleversant pour lequel tu es venu : nous sommes unis à Toi jusque dans ta mort, tu m’entraînes dans une communion à ta mort, pour me permettre de mourir au péché en toi afin de devenir en Toi, par ta résurrection d’entre les morts, un vivant, un vivant de ta vie.
« Désormais, avec le Christ, je suis un crucifié ; je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Car ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi. » (Gal 2, 19b-20)

Cet échange bouleversant, nous sommes tous invités à le revivre pendant ce temps de la passion. Le Christ continue à mourir pour prendre en Lui tout le mal de tous les hommes de tous les temps, en Lui je meurs au péché et à tout le mal qui me ronge pour ressusciter avec Lui de sa vie divine. Mais désormais, pour moi le seul chemin de la vie est de vivre de sa vie, de vivre en lui.

Aujourd’hui encore, la mission de la Mère Église est de nous d’enfanter à la vie en Christ et de nous éduquer à cette vie en Christ. Le message de Pâque est simple : « Jésus est vivant et il nous entraîne dans sa vie, il nous précède dans la Galilée de nos vies quotidiennes, c’est là que nous le rencontrerons comme il nous l’a dit ».
Cette bonne nouvelle est pour tous et n’ayons pas peur d’en être les témoins comme nous y invite le pape François : « Jésus-Christ t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant il est vivant à tes côtés chaque jour pour t’éclairer, pour te fortifier, pour te libérer ! » (La joie de l’Évangile, n° 164).

+ Jean-Pierre Cattenoz
 archevêque d’Avignon