Mot de l’évêque

1er mars 2016

RCF, 26 février 2016

(Suite à l’exhumation de la dépouille mortelle du Père Marie-Eugène)

Le Père Marie-Eugène était un Père carme qui est entré au Carmel juste après son ordination sacerdotale. Il avait été séminariste à Rodez ; il y est entré avant la guerre ; il a dû partir faire la première guerre mondiale ; il a été touché par la Petite Sainte qui l’a accompagné pendant toutes ces années de guerre ; beaucoup de soldats disaient qu’ils avaient envie d’être avec le lieutenant Grialou parce que personne ne mourait dans sa section. Après la guerre, il a repris le séminaire, touché en même temps par Saint Jean de la Croix qui s’est révélé littéralement à lui ; il a eu la certitude qu’il fallait rentrer au Carmel ; il s’est un peu battu avec son évêque pour que son évêque le libère ; mais il a dû aussi se battre avec sa mère qui, étant veuve, souhaitait finir sa vie en servant aux côtés de son fils prêtre ; et voilà qu’il décide de partir au Carmel à l’autre bout de la France. L’appel était trop fort.

Il entre au Carmel d’Avon dans la région parisienne, fait son noviciat et ses premiers vœux. Ensuite, il est nommé à Lille où il va relancer la revue Carmel et il va avoir beaucoup de succès spirituels. De là, il sera nommé mystérieusement le soir du 14 août au Petit Castelet du côté d’Avignon. Il s’agissait d’un petit collège, d’un petit séminaire en quelque sorte, qui avait pour mission de former des jeunes en vue d’entrer au Carmel. Lui ne croyait pas du tout à cette possibilité de choisir une vocation carmélitaine à l’âge de 8-10ans. Mais, dans l’obéissance, il part au Petit Castelet ; là va se vivre la grande rencontre de sa vie puisque, parallèlement à Marseille, il y avait 3 jeunes femmes professeurs qui cherchaient leur chemin. Elles vont passer un week-end à côté de Dijon, au Carmel de Beaune ; la Prieure, en un week-end, y verra clair en leur disant : « Mesdames, vous n’êtes sûrement pas faites pour la vie carmélitaine au Carmel ici, mais vous devriez aller voir un jeune Père carme qui rayonne la grâce, au Petit Castelet à côté d’Arles. » Là ce sera la grande rencontre ; je crois bien que le Père Marie-Eugène a dit « Je vous attendais » .
Ce sera le commencement de l’Institut Notre-Dame de Vie.

Le Père Marie Eugène restera carme toute sa vie ; il sera même un temps l’équivalent de préposé général -le préposé général était décédé. Il sera même souvent le Provincial de son ordre, mais le Général le laissera toujours s’occuper de l’Institut de Notre-Dame de Vie dont il est véritablement le fondateur avec Marie Pila, la cofondatrice.
Il va terminer sa vie en 1967, au mois de mars, un lundi de Pâques, grâce de lumière, et il sera inhumé dans la chapelle de Notre-Dame de Vie le 30 mars ; le préposé général, plusieurs évêques, seront là car durant toute sa vie, il a rayonné la grâce du Carmel.

Il a écrit l’œuvre majeure : « Je veux voir Dieu », véritable somme spirituelle pour notre temps où il donne une synthèse de l’ensemble des saints du Carmel, sur tous les chemins de vie spirituelle pour arriver justement à voir Dieu. Il a également donné beaucoup de retraites, a visité l’ensemble des Carmels du monde lorsqu’il était préposé général et au conseil général de son Ordre.
Beaucoup de gens ont été marqués par leur rencontre avec le Père Marie-Eugène. Par exemple, le Carmel de Lourdes pensait se délocaliser parce qu’il y avait trop de bruit qui montait de la grotte. Et le Père Marie-Eugène leur a dit : « Vous êtes la garde d’honneur de la Sainte Vierge au-dessus de la grotte ; de plus lors du 16 juillet, Bernadette a eu sa dernière apparition alors qu’elle était dans votre jardin actuel, alors vous avez le devoir de rester ici pour être la garde d’honneur de la Sainte Vierge. »

A l’époque de Sainte Thérèse d’Avila, il était impensable pour des femmes de penser vivre en dehors d’un couvent ; le Père Marie-Eugène, lui, va avoir l’intuition que la grâce du Carmel doit aller jusqu’à son terme et permettre à des consacrés laïcs, hommes et femmes, de pouvoir vivre la grâce du Carmel en plein monde, de manière authentique. Et il va fonder en 1932, à Venasque, l’Institut carmélitain qui va petit à petit, prendre forme autour de la certitude qu’on peut vivre la grâce du Carmel dans le monde, avec 2 heures d’oraison quotidienne, avec un véritable noviciat pour se laisser façonner par Dieu, et chaque année un temps de reprise de 3 semaines de solitude dans un des centres de solitude de l’Institut.
La branche féminine va se développer assez rapidement, puis s’adjoindront une branche masculine et une branche sacerdotale.
Aujourd’hui, l’Institut est présent dans de nombreux pays à travers le monde : en Amérique latine, en Amérique du nord, en Asie. L’Institut est devenu progressivement association de fidèles dans le diocèse d’Avignon quand l’évêque d’Avignon d’alors est venu à Notre-Dame de Vie et a même eu cette parole prophétique en disant : « Oh la la ! Il pleut, alors ça germera ! » De fait, le germe de l’Institut a pu se déployer d’une manière merveilleuse. Quelques années plus tard, ils sont devenus un Institut de droit pontifical et maintenant, ils ont vraiment leur place au cœur de l’Église.

Pour ma part, j’ai été membre de l’Institut avant d’être évêque ; et avant que la Pape Jean-Paul II me demande d’être archevêque d’Avignon, j’ai été pendant 2 ans, le responsable des prêtres. Mais, en devenant évêque, on cesse d’appartenir formellement à un Ordre, quel qu’il soit, pour manifester qu’on entre dans le collège des apôtres, et qu’à ce titre-là, on est au service de l’Église universelle.

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