Prenez l’enfant dans vos bras !

15 février 2013

Mot de l’évêque - Eglise d’Avignon n°86


Le nombre de familles en précarité ne cesse d’augmenter, les organismes caritatifs n’arrivent plus à faire face aux urgences. Les aides publiques sont en diminution d’année en année et malgré leur générosité nos concitoyens n’arrivent plus à fournir l’aide nécessaire aux plus démunis. Chaque semaine les journaux publient dans leurs colonnes le nom des sociétés se déclarant en cessation de paiement ou en redressement judiciaire. Cela signifie des milliers de personnes qui vont se trouver au chômage ou en précarité.

Le secours catholique et de nombreux organismes liés à l’Église font tout ce qu’ils peuvent pour répondre aux besoins les plus urgents sans pouvoir toujours y parvenir. Il en est de même d’une multitude d’organisations en tout genre. La pauvreté, la misère, la précarité restent des scandales dans nos sociétés hyper développées.

Et voilà Marie et Joseph qui arrivent dans la Maison de Dieu à Jérusalem pour présenter à Dieu l’enfant Jésus. Marie le serre dans ses bras : il est son enfant mais il est également son Dieu. Elle ne cesse de méditer dans son cœur tout ce qu’elle vient de vivre depuis un an. Elle commence à saisir que Dieu s’est fait petit enfant pour nous apprendre à le devenir à notre tour. Lui l’enfant bien-aimé du Père, il n’a rien, mais il reçoit tout du Père éternellement et sa mission est de nous faire comprendre que notre vocation à chacun de nous est d’entrer dans ce mystère d’enfance, de dépendance : se désapproprier de nous-même pour se recevoir d’instant en instant de notre Père du ciel.

Le vieillard Syméon est là, Marie lui tend l’enfant, il le prend et le serre sur son cœur. L’Esprit Saint vient de lui révéler que ce petit enfant est l’Emmanuel attendu depuis des siècles. Syméon est rempli de joie, de la joie de serrer dans ses bras son Sauveur et son Dieu. Oui, il faut qu’il grandisse et que je diminue, que je redevienne un enfant qui attendra tout de son Père du ciel comme Lui, dans la confiance et l’abandon.

La vieille prophétesse Anne, elle qui a connu la plénitude de la vie conjugale puis la vie en plénitude, s’approche à son tour ; elle regarde Syméon et l’enfant ; elle se réjouit elle aussi et se met à parler de l’enfant à tous ceux qu’elle rencontre. A son tour, elle prend l’enfant dans ses bras et dans sa joie, elle se met à danser, elle lève l’enfant pour nous le présenter.
Alors en ce mois de février, prenons nous aussi l’enfant dans nos bras, serrons-le sur notre cœur, il deviendra en nous source de vie et cette vie deviendra à son tour source de lumière pour chacun de nous.

Nous ne savons plus nous situer dans les ténèbres de notre monde, devant une société qui ne sait plus où elle en est parce qu’elle refuse au fond de reconnaître que nous devons tous accepter de dépendre de cet enfant, de nous recevoir de Lui. Le drame de notre monde est de refuser radicalement toute dépendance par rapport à celui qui nous a fait ; comment ne pas penser aux mots de saint Augustin : « Tu nous as fait pour toi et notre cœur est sans repos s’il ne repose en toi ».

Nous aurons beau voter des lois sur le mariage pour tous, sur le droit à l’enfant au détriment du droit des enfants, nous aurons beau envisager de permettre aux gens de mourir dans la dignité, nous aurons beau mettre en place un eugénisme qui permette de ne plus faire souffrir les enfants handicapés incapables de trouver le chemin du bonheur, et cela en mettant fin à leur souffrance, où cela nous mènera-t-il ? Nous aurons beau changer les mots, si nous ne changeons pas nos cœurs, nous continuerons à vivre dans un monde défiguré, marqué par la mort, alors qu’il est fait pour trouver la VIE en la recevant de cet enfant, que Marie vient de reprendre, pour l’aider à grandir et à se préparer à sa mission de charpentier d’un monde nouveau, sur la charpente de la Croix.

+ Jean-Pierre Cattenoz
archevêque d’Avignon